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RIENZI.

salle. Nous avons jugé que le meilleur parti à prendre était de laisser Votre Éminence décider de ce qu’il fallait faire.

— Ah ! Vous avez jugé !… Qui êtes-vous donc alors ?

— Un des membres du conseil, Éminence, et un rude adversaire du tribun, tout le monde le sait, quand il a voulu ce nouvel impôt.

— Le conseil… Qu’est-ce que c’est que ça ? Est-ce qu’il y a encore des conseils ? Comme si l’ordre n’était pas enfin rétabli. Les Orsini et les Colonna veilleront sur vous à l’avenir. Vous vous opposiez à la levée d’un impôt, dites-vous ? Eh bien, vous aviez raison quand c’était un tyran qui le proposait ; mais je vous avertis, l’ami, de prendre garde à l’opposition que vous seriez tenté de faire à la taxe que nous vous imposerons. Heureux si votre cité peut à tout prix racheter sa paix avec l’Église ! car Sa Sainteté est à court de florins. »

Le conseiller déconfit se retira.

« Arrachez cet insolent placard. Non, arrêtez ! Affichez par dessus la mise à prix de la tête de l’hérétique pour dix mille florins ! — dix mille ! Il me semble que c’est beau coup maintenant : nous changerons le chiffre. En attendant, Rinaldo Orsini, seigneur sénateur, faites marcher vos soldats sur San Angelo ; voyons si l’hérétique peut soutenir un siége.

— C’est inutile, n’en déplaise à Votre Éminence, dit le conseiller, se hâtant de revenir étaler son zèle officieux ; San Angelo s’est rendu. Le tribun, sa femme et un page se sont échappés, dit-on, la nuit dernière, sous un déguisement.

— Ah ! dit le vieux Colonna, dont la raison appesantie avait fini par deviner que quelque chose d’extraordinaire arrêtait la marche de ses amis : qu’y a-t-il ? Quel est ce placard ? Personne ne voudra-t-il m’en dire le sens ? La vieillesse m’a affaibli la vue. »

Comme il prononçait ces mots d’une voix aiguë et per-