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A.-F. HEROLD

Bramine, seul avec la Veuve, se désole d’abord de recevoir

                                      des deux côtés
Des reproches cruels et si peu mérités.

Il dit toute la tristesse qu’il ressent ; il dit combien il déteste la loi qu’il est chargé d’exécuter.

Hélas ! plus je vous vois, plus mon âme attendrie
Répugne à cet arrêt qui vous ôte la vie.

La Veuve s’étonne :

Comment à ces autels celui qui se destine
Prend-il l’engagement sans l’esprit du bramine ?


Et le jeune Bramine en vient à raconter ses malheurs. Lui aussi faillit être la victime d’une coutume cruelle :

Je trouve donc partout un usage sinistre ;
J’échappe à l’un, de l’autre on me fait le ministre.

la veuve

Eh ! qui vous poursuivait ?

le jeune brahmine

                                                     L’usage meurtrier
Qui trois jours fait suspendre aux branches d’un palmier
Tout enfant nouveau-né dont la lèvre indocile
Fut le premier soutien de son être fragile :
Qu’il refuse le sein par trois fois présenté,
Dans les ondes du Gange il est précipité :
J’allais périr !


La Veuve songe à la triste destinée de sa famille :

                        Un des miens, moins heureux,
Fut proscrit sans pitié par cet usage aflfreux :
Je vais être à mon tour d’un autre usage étrange
Victime au Malabar, comme lui sur le Gange ;
Et nous aurons péri dans des lieux différents,
Mon frère à son aurore, et moi dans mon printemps.

Et voici un coup de théâtre.

le jeune brahmine

Votre frère, Madame, il périt au Bengale !
Telle était dans Ougly mon étoile fatale.

la veuve

Dans Ougly ! Quel rapport !