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me coûtait le plus ; car jamais je n’avais été sans ma pauvre mère, et je suis naturellement très-timide ; c’est au point que lorsque j’allais pour tirer un cordon de sonnette, je tremblais toujours, et souhaitais presque qu’on me dît que la personne que j’avais à solliciter n’y était pas ; et même, dans un endroit où j’allais très-souvent, je savais que la maîtresse de maison avait l’extrême bonté de dire à tout le monde que j’étais fort stupide. Cette idée seule suffisait pour m’intimider encore davantage, et par cette raison même on pouvait me supposer un peu plus sotte que je ne le suis véritablement.

Je vis M. le directeur de l’Opéra-Comique, afin de le prier de m’accorder une audition, ce qu’il me promit ; mais il n’entendit point cet ouvrage que je venais de composer. En attendant qu’il tînt sa promesse, j’en fis un nouveau en un acte, le Retour du Tasse, grand opéra avec récitatifs.

M. Berton me disait que lorsqu’il faisait une nouvelle partition, il était toujours tenté d’écrire sur la dernière page : « Ici, finit le plaisir. » Il avait bien raison. Lorsqu’on compose, on ne pense qu’à son travail ; on ressent une grande sa-