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Je ne chercherai point à décrire l’état pénible dans lequel je me trouvais pendant cette exécution. Le théâtre, à peine éclairé, les artistes ne pouvaient même lire leur rôle. Vers le milieu du premier morceau, à un point d’orgue, des applaudissements partirent du parterre ; à la fin de ce morceau, mêmes applaudissements, mais M. Crosnier, frappant de sa canne, leur imposa silence et leur défendit d’applaudir (c’est une personne de mes amies, qui s’était glissée au parterre afin d’entendre les observations que pourrait faire M. Crosnier, qui m’apprit cela). — Le froid le plus glacial régna après cet ordre. Enfin, on exécutait le dernier morceau, lorsque arrivèrent les frères Dartois. Je les vis entrer et aller se placer près du directeur. Presque immédiatement ils sortirent tous ensemble sans me dire un seul mot. Mes amies m’emmenèrent et commencèrent à voir comme moi que mon audition n’était pas sérieuse. Cette journée, celle du lendemain furent affreuses de désespoir pour moi !… Le troisième jour je reçus une lettre, je reconnus l’écriture de M. Dartois. Je la froissais convulsivement dans la main ; je la tenais ainsi il y avait déjà une heure, sans l’avoir encore ouverte, lorsqu’on sonna chez moi. Ce coup de sonnette