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d’injustices. M. Auber, dont les mélodies sont si ravissantes, a lutté pendant douze ans avant de se faire le nom glorieux qu’il a aujourd’hui. M. Meyerbeer, s’il n’avait pu donner cent mille francs pour faire jouer son Robert-le-Diable, le monde eût été privé de l’un des chefs-d’œuvre le plus remarquable. M. Adam n’a certes pas réussi de suite non plus. Félicien David, s’il ne s’était point fait entendre au Théâtre-Italien, serait resté dans le désert ; enfin tant d’autres. Ces exemples m’ont donc soutenue, quoiqu’assurément je sois loin de comparer mon faible talent à celui de ces compositeurs. Mais cependant je sens aussi, et sans la moindre présomption, que je puis arriver puisqu’à différentes reprises j’ai obtenu des succès et étant loin d’avoir les éléments que l’on trouve réunis au théâtre : d’excellents chanteurs qui répètent jusqu’à parfaite exécution ; un bon orchestre (car moi, lorsque j’obtenais deux répétitions d’orchestre, et d’un orchestre composé d’amateurs), c’était tout. Aussi l’exécution devait-elle laisser beaucoup à désirer. Ayant donc obtenu des succès avec tant d’inconvénients qui auraient pu me faire échouer, je crois pouvoir (sans vanité) en espérer de solides, avec les chances d’une bonne exécution.