Page:Mémoires de Louise Michel.djvu/315

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tant désiré qu’on gravât les noms. Peut-être un jour je le ferai moi-même, laissant abrupt le roc à demi couvert de brousse.

Lorsque nous demeurions à Numbo, dans les baraques en bas de l’hospice, j’avais à demi démoli celle qui était inhabitée pour en faire une serre ; les gardiens furent épouvantés de mon audace : oser toucher à un bâtiment de l’État ! et les déportés, eux-mêmes, me trouvant pas mal de toupet, se demandaient ce qui m’en arriverait à la visite du gouverneur.

Il m’en arriva que je lui fis voir, dans le coin le plus à la lumière, des arbres en traitement que je voulais cacher jusqu’à la complète réussite de l’essai.

C’étaient quatre papayers que j’avais vaccinés au pied avec de la sève d’autres papayers malades de la jaunisse.

Le gouverneur, c’était la Richerie, comprit l’essai et ordonna que la serre me fût laissée.

Mes quatre papayers eurent la jaunisse et se rétablirent ; peut-être furent-ils les seuls qui n’en moururent pas cette année-là, surtout les papayers de la presqu’île. Mais M. Aleyron, de grotesque et brutale mémoire, ayant envoyé les femmes à la forêt Ouest, je ne sais ce que devinrent mes arbres.