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Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 22.djvu/115

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dement important. Le nom de colonne infernale donné par les Espagnols à ce corps de troupes sanctionne bientôt d’une manière éclatante tout ce qu’il y avait d’anomal, d’inusité, d’étrange dans la combinaison suggérée par Carnot et réalisée par les représentants.

Latour d’Auvergne, que vous connaissez. maintenant, Messieurs, comme militaire, quittait pour la troisième fois sa retraite, ses chères études d’érudition, et demandait à servir sous Moreau, lorsque Carnot devint ministre de la guerre après le 18 brumaire. Déjà, à cette époque, le premier consul n’eût certes pas approuvé une combinaison semblable à celle que les représentants conventionnels avaient adoptée sur les Pyrénées. Carnot, cependant, souffrait de voir que le chef de la colonne infernale, que celui qui comptait tant d’actions d’éclat, que l’estimable auteur des Origines gauloises, faut-il le dire aussi, qu’un correspondant de l’Institut, arriverait sur le Rhin comme le plus obscur combattant. Le titre de premier grenadier de France frappe son imagination ; Latour d’Auvergne en est revêtu par un acte officiel et dès ce moment, sans quitter ses épaulettes de grenadier, il devint aux yeux des soldats l’égal, si ce n’est le supérieur des premiers dignitaires de l’armée.

Le premier grenadier de la République fut tué d’un coup de lance le 27 juin 1800, à la bataille de Neubourg. L’armée, la France tout entière pleurèrent amèrement cette perte. Quant à Carnot, sa douleur profonde lui inspira une pensée que l’antiquité, d’ailleurs si idolâtre de la gloire militaire, pourrait nous envier. D’après un ordre émané de lui, lorsque la 46e demi-brigade était réunie, l’appel commençai toujours par le nom de Latour d’Auvergne. Le grenadier