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Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 22.djvu/7

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LAZARE-NICOLAS-MARGUERITE CARNOT.

cent, naissent et grandissent ces intelligences extraordinaires qui, après leur entier développement, doivent se frayer des routes inconnues. Ces traits caractéristiques méritent d’être recueillis avec d’autant plus d’intérêt, qu’ils deviendront chaque jour plus rares. Dans nos écoles modernes, taillées, du nord au midi, de l’est à l’ouest, exactement sur le même patron soumises à des règles communes, à une discipline uniforme ; où les enfants d’ailleurs arrivent à l’âge de neuf à dix ans pour n’en sortir qu’à dix-huit ou vingt, les individualités s’effacent, disparaissent ou se couvrent d’un masque de convention. L’agronome se garde bien d’aller dans une serre chaude, quand il veut connaître la taille, la forme, le port de ces admirables plantes qui sont l’ornement des forêts séculaires. Ce n’est pas non plus dans nos régiments qu’on pourrait espérer de retrouver les vrais types des paysans bretons normands lorrains ou franc-comtois. Nos écoles-régiments (qu’on me passe l’expression) ne dérouteraient pas moins les moralistes. Là, il s’établit une sorte de moyenne autour de laquelle, avec de très-légers écarts, toute la jeunesse va aujourd’hui se grouper. Est-ce un bien, est-ce un mal Dieu me garde d’aborder ici une semblable question je dis seulement que c’est un fait, et ce fait expliquera pourquoi j’ai recueilli diverses particularités de l’enfance de notre confrère qui, sans cela, auraient pu sembler trop minutieuses.

Carnot n’avait encore que dix ans lorsque sa mère dans un voyage à Dijon, l’emmena avec elle et, pour le récompenser de la docilité réfléchie qu’il montrait en toute circonstance, le conduisit au spectacle. On donnait ce jour-là une pièce où des évolutions de troupes, où des combats se