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INFLUENCE DU PARTI PRÊTRE

déplaisantes au pays, en croyant consciencieusement accomplir un devoir.

L’opinion publique était déjà fort exaspérée lorsque monsieur de Montlosier adressa, à la Chambre des pairs son Mémoire à consulter contre les jésuites. Cet ouvrage eut un succès de vogue, et la voix de ce vieux défenseur du Roi et de la religion, venant dénoncer le parti prêtre, eut un prodigieux retentissement dans le pays. L’expression frappa d’une façon indélébile les intrigants de sacristie. L’appellation de parti prêtre remplaça souvent celle de Congrégation et rendit encore plus impopulaires ceux qui méritaient d’y être rangés.

La Révolution a laissé en France beaucoup de religion, mais peu de bienveillance pour ses ministres ; et, dès qu’un ecclésiastique veut ajouter l’influence politique à l’influence religieuse, il perd toute considération. On ne le tolère qu’à l’église ou au lit du pauvre ; mais, là, on le respecte et le révère. Je ne sais si c’est mieux ou plus mal, mais c’est ainsi que la Révolution nous a faits. Le Roi, le clergé et les émigrés ne voulaient pas plus se l’avouer que les autres faits accomplis en leur absence. Toutefois, le mémoire de monsieur de Montlosier, et l’effet qu’il produisit dans le public, arrêta un moment le vol des prétentions jésuitiques. Monsieur de Villèle, leur aurait volontiers coupé les ailes, s’il avait osé.

Nous eûmes à cette époque une grande joie de famille. La santé de ma belle-sœur, toujours très délicate, avait été encore affaiblie par trois fausses couches successives, et nous désespérions de lui voir des enfants lorsque, le premier janvier 1827, après neuf ans de mariage, elle accoucha d’une fille. Cet événement, si désiré et si longtemps attendu, nous causa une vive satisfaction, et je dois dire que le public sembla y prendre une part fort obligeante. Madame la Dauphine témoigna un très grand