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FONTAINEBLEAU EN 1834

réunies ; les politesses royales s’y distribuaient aux nouveaux arrivés.

Bientôt on passa au dîner, dans la galerie qui s’appelait encore de Louis XVIII. Le banquet était magnifique, la chère bonne, la société choisie. Sous prétexte de costume de voyage, les gens portaient des vestes bleues galonnées d’argent, livrée des rois prédécesseurs. Tout ce qui entourait était semé de fleurs de lys.

Il y avait, dans ce voyage, un certain parfum de trône, tout au moins une évidente velléité à remonter d’une marche l’échelle de la royauté. Les ambassadeurs étrangers le remarquaient et s’en réjouissaient. J’avoue, de bonne foi, que je partageais leur satisfaction.

C’était la première fois, depuis la Révolution, que je voyais le Roi oser se souvenir qu’il était petit-fils d’Henri IV. Cette demeure si aristocratique de Fontainebleau rappelait le sang Bourbon dans ses veines et il y prenait goût. Toutefois, c’était avec les nuances sociales que le siècle imposait ; et, quoique plus royales que je ne les avais encore vues à l’extérieur, les formes étaient pleines d’urbanité et le commerce entre les illustres hôtes et leurs convives aussi facile qu’obligeant.

Un spectacle bien choisi remplit la soirée. La salle contenait, en outre des invités du château, toutes les notabilités de la ville, enchantées de voir recommencer ces brillants voyages de Fontainebleau interrompus pendant la Restauration.

Aussi le Roi fut-il reçu avec des acclamations qu’il retrouvait dans la population toutes les fois qu’il se montrait dans les rues ou dans le parc, ce qui lui arrivait perpétuellement et presque seul. Il n’avait pas encore été condamné aux précautions que la manie du régicide lui a imposées bientôt après.

Quoique des rafraîchissements eussent été largement