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UNE SEMAINE DE JUILLET 1830

lui avait fait beaucoup d’excuses de l’avoir dérangé. Pour n’être pas en reste de civilité, il avait, de son côté, témoigné le regret de n’avoir pas d’armes à offrir à ces messieurs.

« Ah ! monsieur, nous en sommes bien sûrs. Quel français ne s’associe pas, au moins de cœur, à notre noble cause ?»

Chavernac vit ce même groupe aller frapper à la porte suivante où on lui donna deux grands pistolets et quelques balles. Il possédait déjà une douzaine de fusils et autant de pistolets recueillis probablement de la même façon. Au reste, ces collectes eurent lieu dans presque tous les quartiers de Paris ; et, ce qui est aussi singulier que la douceur avec laquelle les refus étaient accueillis, huit jours après, la presque totalité de ces armes, dont beaucoup étaient de prix, avaient été rapportées à leur propriétaire.

Vers cette heure, ou même avant, on distribua une petite feuille du journal Le Temps ; elle racontait les événements et excitait à résister à la troupe en promettant la victoire. Elle ne fut pas sans influence.

Mon homme me rapporta la réponse d’Arago ; il allait se rendre à l’état-major, sans en espérer grand succès mais pour n’avoir rien à se reprocher et comme français et comme ami.

Le bruit du canon semblait se ralentir. Tout à coup il reprit plus vivement et évidemment de plusieurs côtés. Les fusillades recommencèrent aussi, mais elles s’étaient éloignées de nous. Les portes se remeublèrent de femmes, d’enfants et d’un petit nombre d’hommes ; plusieurs étaient réinstallés à la mairie que la troupe avait été forcée d’évacuer après l’avoir occupée un moment.

Je vis alors passer un homme portant un panier couvert comme les marchands de gâteaux. Il distribuait des