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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

remis au lendemain à m’occuper de son billet. D’ailleurs, il était plus de six heures ; la matinée était achevée.

Je vis assez de monde dans la soirée. On me fit beaucoup de récits contradictoires sur ce qui s’était passé à l’Hôtel de Ville et à la Chambre ; j’en conserve un faible souvenir. Je me rappelle seulement qu’Alexandre de Laborde nous arriva dans des transports de joie qui nous révoltèrent et nous impatientèrent.

L’impression des gens avec lesquels je vivais était grave et triste : nous voyions, dans ce qui se passait, un résultat nécessaire des fautes commises ; mais ce résultat nous apparaissait comme une fatalité sur laquelle on devait gémir tout en s’évertuant pour éviter qu’elle ne devint une calamité plus grande en jetant le pays dans l’anarchie.

Personne n’était plus attristé ni plus effrayé que monsieur Pasquier ; je lui dois cette justice. J’avouerai, avec la même franchise, que ses craintes me semblaient un peu exagérées. Appuyée sur ma Glorious Revolution de 1688, le chemin me paraissait devoir être plus facile qu’il ne s’est trouvé.


(1er  août.)

Le dimanche 1er  août, madame de Montjoie entra dans ma chambre à sept heures du matin. Elle me dit que Mademoiselle voulait causer avec Pozzo : s’il consentait à venir au Palais-Royal, il pourrait y entrer par une porte très éloignée du palais ; si cependant il y avait objection, Mademoiselle offrait de venir le rencontrer chez moi ; si le premier arrangement lui convenait, il sortirait avec moi, ayant l’air de me donner le bras pour nous promener aux Tuileries. Nous gagnerions la rue Saint-Honoré.