Page:Mémoires de la société géologique de France - 1re série - 1 - 1833-1834.djvu/243

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dû se faire jour. Si donc la volcanicité s’est établie sans grands efforts, c’est que le sol granitique et tertiaire était déjà fracturé en ce point, et peut-être déjà bombé.

M. Lecoq attribue aux volcans modernes le principal soulèvement des Monts Dore. Je suis loin de leur accorder cette puissance tout-à-fait excentrique, puisqu’ils se sont fait jour à d’assez grandes distances des points soulevés ; mais je suis tenté de croire que les commotions qui ont dû précéder et accompagner ces éruptions ont contribué, en crevassant le sol, à commencer les vallées ; car je ne suis pas de ceux qui pensent que les eaux ont pu, par leurs forces virtuelles, entamer aussi profondément le sol. Mais que des fissures, des éboulemens, conséquences de l’action volcanique, offrent prise au choc des eaux, aux affouillement, alors je conçois une dégradation proportionnelle dans la durée et les résultats à la masse et à la vitesse des eaux. Le fait de grandes érosions par les eaux n’est, je crois, contesté par personne ; seulement on leur fait une part plus ou moins grande dans la dégradation de l’ancien cône volcanique. Les énormes amas de conglomérats remaniés témoignent d’une grande puissance de transport et d’accumulation. Ce n’est pas que la volcanicité se soit développée sous les eaux ; lorsqu’elle a commencé, des végétaux arborescent s’élevaient sur le sol, et les escarpemens de quelques vallées recèlent encore leur débris calcinés. Nous avons été assez heureux, M. de Verneuil et moi, pour voir un très beau gisement de ces arbres carbonisés, dont la structure fibreuse et annulaire est très visible, et dont quelques parties sont complètement changées en pyrites. Ils sont enclavés dans un de ces conglomérats, assez communs, formés de gros fragmens de trachyte, liés par un ciment presque insaisissable ; en descendant du Puy de Chavaroche par la Vacherie, vers la vallée de la Bastide ou de Fontanges, on va tomber au hameau de la Peyre Delcros ; les bois sont à peu de distance au-dessous, sur le bord et dans le lit même du ruisseau, au pied d’un escarpement facile à distinguer par sa couleur blanche. La végétation détruite avait sans doute pris possession des flancs de la montagne pendant le sommeil du volcan, car j’ai trouvé sur le plateau du Puy Violent, à une hauteur d’environ 1,300 mètres, une empreinte très nette de feuilles dans les conglomérats basaltiques. Ce n’est donc probablement qu’après l’extinction totale des feux volcaniques, ou tout au plus pendant leur dernière période, que de grandes masses d’eaux sont venues se ruer sur ces montagnes. Elles ont changé d’étroites fractures en larges vallées, des éboulemens peu étendus en cirques (cirques des Ronvières, hautes vallées de la Jordanne), un cratère régulier en une cavité difforme, et un cône volcanique en un massif sans nom. Le temps a eu aussi sa large part dans ces changemens.

Je ne sais si j’ai clairement exprimé ma pensée, si vous avez apprécié les élémens nombreux et positifs sur lesquels s’est formée ma conviction ; j’ai cherché à démontrer dans ce Mémoire :