Page:Mémoires de la société géologique de France - 1re série - 1 - 1833-1834.djvu/263

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amoncelés à peu de distance de l’embouchure ; puis remaniés, dispersés, rejetés à droite et à gauche par le ressac et les chocs des vagues agitées. Au moyen de ce mécanisme long-temps répété, les cailloux, issus d’une seule gorge ou échancrure des montagnes, se trouvent, à la suite des temps, disposés en couches plus ou moins régulières, dont la superficie occupe plusieurs lieues carrées. Les vallées extérieures de la Garonne et de l’Adour en offrent des exemples.

Si le niveau de la mer vient à s’abaisser de quelques toises, la couche des cailloux roulés laissée à découvert est parcourue, sillonnée et creusée par le torrent qui les a précédemment charriés, et cette excavation se poursuit dans l’épaisseur des limons sableux inférieurs.

Le battement des vagues élargit promptement le nouveau canal que s’est ouvert le courant fluviatile dans ce terrain meuble ; et le sol de ce canal élargi est bientôt recouvert d’une nouvelle couche de cailloux roulés charriés et remaniés de la même manière.

Chaque abaissement de la mer a dû reproduire ce phénomène, dont les monumens se rencontrent partout variés et modifiés par les circonstances locales. Au pied des Pyrénées orientales, la vallée de la Tet ne présente d’une manière bien distincte que deux de ces étages. On en discerne jusqu’à quatre dans celles de l’Arriége et de la Garonne.


§ XII. Des blocs erratiques.

Dans les amas de cailloux roulés dont la Loire a comblé les cavités profondes de sa vallée, il se trouve des blocs granitiques et porphyriques dont le volume est de 30 à 40 mètres cubes.

Les eaux de la vallée de Bagnes, en Valais, retenues par une avalanche de neige, puis mises en mouvement par la rupture de cette digue fragile, nous ont donné l’exemple, il y a peu d’années, de tout ce qu’ont pu produire, dans les temps anciens, les débâcles des réservoirs dont on ne voit plus dans les hautes régions des montagnes que les cavités échancrées et vidées.

Sans recourir à ces débâcles, les longues pluies et les grandes averses suffisent quelquefois pour imprimer aux torrens une force capable d’entraîner au loin des blocs très volumineux, et de les déposer soit au fond des vallées, soit aux étages inférieurs des collines situées sur leur passage.

Mais les plus remarquables de ces amas de roches transportées se trouvent situés de manière à rendre leur transport très difficile à expliquer et à concilier avec la disposition actuelle du sol terrestre.

De grandes et profondes vallées, de grands lacs, et ailleurs des bras de mer se trouvent interposés entre ces amas et les masses dont leurs roches ont été détachées. Des blocs de granite alpin sont maintenant déposés sur les pentes et