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la loi de trois ans

y a quelques années, et qui doit être le point d'appui de la politique extérieure ". Cette même mentalité faisait réclamer vers la même époque aux généraux Keim, Falkenhausen et Bernhardi, dans de multiples conférences, l'application intégrale du service obligatoire.

Survint alors la guerre des Balkans, la défaite de la Turquie inféodée à l'Allemagne, et l'épanouissement du slavisme dans les Balkans. "Nous ne pouvons plus compter, en cas de conflit européen, écrivait le général von Bernhardi à la fin de 1912, ni sur la Turquie, ni sur la Roumanie, ni sur la totalité des forces autrichiennes. Nous aurons contre nous non seulement les Français et les Anglais, mais la masse principale des forces russes. Les revers des Turcs ont nui à notre prestige militaire ; il n'y a pas jusqu'à la Belgique qui ne se reconnaisse un coeur de français et qui ne tourne en dérision les piètres résultats de l'instruction allemande en Turquie."

Ainsi donc, depuis deux ans, l'Allemagne avait vu la France lui tenir tête avec l'appui non seulement de la Russie, mais encore de l'Angleterre. Sachant qu'elle ne pouvait faire que peu de fond sur l'Autriche, et qu'elle ne devait point compter sur l'Italie, elle renforçait sa puissance militaire. Peut-être désirait-elle la paix, mais une paix résultant de la satisfaction donnée à toutes mes ambitions extérieures, et de la subordination des puissances voisines à ses désirs, une paix, pour tout dire, issue de la crainte qu'elle inspirerait.

Il importe maintenant de définir les résultats de ces lois militaires.

Par la loi de 1912, le commandement allemand n'avait pas cherché à augmenter le nombre de ses grandes unités actives mobilisés. Nous savions, en effet, depuis longtemps, que deux corps d'armée portant les numéros 20 et 21 devaient être formés à la mobilisation par l'adjonction à la 3e division de chacun des 1er et 14e corps, d'éléments en surnombre dans des corps d'armée voisins. La création organique de ces deux corps d'armée (20e et 21e) ne constituait donc pas une augmentation du nombre des grandes