Page:Mémoires du maréchal Joffre (1910-1917) T.1.pdf/250

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
236
mémoires du maréchal joffre

il semblait impossible que, dans un pareil conflit, un pays comme l'Angleterre fît la guerre à demi. C'était très important pour nous. D'ailleurs, presque en même temps, j'appris l'ultimatum envoyé la veille au soir par l'Allemagne à la Belgique, ainsi que la réponse faite par le gouvernement belge à cette insolente menace. Il n'était pas difficile de prévoir que l'Angleterre serait obligée d'intervenir dans une lutte où la Belgique se trouvait ainsi entraînée.

Dans le courant de l'après-midi du 3 août, je réunis les commandants d'armée ; ils étaient tous présents, à l'exception des généraux de Castelnau et Ruffey. Il était encore trop tôt pour annoncer formellement mon dessein d'opérer en Belgique : trop d'inconnues restaient à résoudre. Je me bornai à indiquer les grandes lignes de la manœuvre probable, c'est-à-dire ma combinaison de deux attaques, l'une en Lorraine et l'autre au nord de la ligne Verdun-Toul. En outre, j'indiquai que les armées de droite et particulièrement celle destinée à agir en Lorraine auraient pour mission principale de retenir le plus grand nombre de corps d'armée ennemis possible au profit de l'action de gauche. Enfin, j'appris aux commandants d'armée que, selon toute probabilité, l'armée de Lorraine, la IIe, aurait à mettre deux corps d'armée à ma disposition pour renforcer l'action de nos forces de gauche.


Mardi 4 août. — La grande inconnue restait toujours la situation internationale, c'est-à-dire le groupement des forces européennes qui devait déterminer nos possibilités de maœuvre.

De Russie, nous ne savions, pour le moment, à peu près rien.

Le 4 dans la matinée, nous apprîmes la neutralité officielle de l'Italie si précieuse pour nos transports d'Algérie et du Maroc. L'intervention à nos côtés de l'Angleterre devenait si probable au cours de cette même journée, qu'à 17 heures, le ministre envoya des instructions aux commandants de Boulogne, de Rouen et du Havre, en prévision des débarquements à prévoir dans ces ports.

Du côté belge, les événements se précipitaient. La nouvelle