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l'armée belge

de cadres. Le général de Selliers, le nouveau chef d'État-Major général, était récemment encore commandant de la gendarmerie. L'opinion publique belge manifestait hautement son indignation de l'attitude allemande et ses vives sympathies pour nous. Il semblait bien que le gouvernement belge, très désireux de conserver son indépendance, chercherait à donner satisfaction au sentiment national ; mais le problème militaire qui se posait brusquement à lui n'était pas sans l'inquiéter, et il semblait bien que l'armée belge tournait déjà ses regards vers la place forte d'Anvers, où elle se retirerait si la Liége venait à tomber.

De ces renseignements reccueillis sur place, on pouvait déduire que le gouvernement belge hésiterait à participer à des opérations offensives combinées avec les nôtres, et limiterait son action à une attitude purement défensive ; il semblait, en particulier, difficile d'espérer que la division de cavalerie belge vînt coopérer aux opérations de notre corps de cavalerie comme je l'aurais souhaité.

Le 7 août, je demandai au major Collon, officier de liaison belge auprès du G. Q. G. français, de porter à Louvain mon point de vue sur le rôle à jouer par l'armée belge :

A mon avis, celle-ci pourrait se porter sur la Meuse, en disputer les passages et gagner ainsi un temps précieux pour la coopération alliée. Si cette coopération pouvait se réaliser en temps utile, l'armée belge saisirait l'occasion favorable pour attaquer en flanc les colonnes ennemies défilant devant elle pour aller à la bataille contre les forces franco-britanniques. Dans le cas où la disproportion des forces ne permettrait pas de conserver cette attitude, l'armée belge aurait à battre en retraire sur Namur et à venir se lier au flanc gauche des armées franco-anglaises.

Or, peu de temps après avoir reçu le compte rendu de mission du lieutenant-colonel Brécard, un télégramme du ministre de la Guerre belge, M. de Brocqueville, vint confirmer les renseignements qui venaient de me parvenir : "le ministre de la Guerre belge demande au généralissime français l'appui aussi rapide que possible de l'armée française ; il est absolument nécessaire de faire, ne serait-ce