Page:Méric - À travers la jungle politique et littéraire, 2e série, 1931.djvu/23

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surprenne et rebute. Pour le suivre, sur son libre chemin, il faut avoir des jambes solides et l’œil clair. Sa philosophie n’est point, comme disait Richepin, pour des « palais d’enfants lécheurs de crème ».

Aussi combien ces termes qu’on voudrait lui appliquer : indépendant, homme libre, individualiste, paraissent usés, palots, éculés ! En-Dehors, voilà le seul qualificatif qui convienne. Et quand d’Axa eut jugé qu’il en avait assez dit, qu’il serait fastidieux de se répéter, il prit son bâton et s’en alla sur les routes, tel le Juif-Errant. Il marcha, il marcha. Il courut vers le Nord et redescendit vers les chauds midis. Il remonta les canaux jusqu’à la mer. Il vit les Amériques, la Chine, le Japon, les Indes. L’air pur, l’air éblouissant du large gonflait ses poumons. De même qu’un autre en-dehors qui, lassé lui aussi d’écrire en vers et en prose, s’évada de la galère sociale, il aurait pu s’écrier :

Je sais les cieux crevant en éclairs et les trombes,
Et les remous, et les couchants ; je sais le soir,
L’aube exaltée ainsi qu’un peuple de colombes,
Et j’ai vu quelquefois ce que l’homme a cru voir.

Ce qu’il méprisait et haïssait, c’étaient les villes tentaculaires qui sont autant de fourmilières où grouillent les appétits et les laideurs. Il en avait trop vu de ces troupeaux, en apparence différents de mœurs, mais d’habitudes identiques. Sans verser dans la misanthropie, il évitait les hommes, mettait toute sa joie à coudoyer les simples.

Je l’ai rencontré, souvent, la main posée légèrement sur la selle de sa bicyclette. Il me disait : « C’est une com-