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Je suis très-souffrant, je tousse à fendre les rochers, et cependant je vais lundi soir entendre mademoiselle Rachel dire des tirades de Phèdre devant cinq ou six grands hommes. Elle croira que ma toux est une cabale contre elle. Écrivez-moi bientôt. Je m’ennuie horriblement, et vous feriez une œuvre de charité en me disant quelque chose d’aimable, comme vous faites quelquefois.

XXXIV

Décembre 1842.

Il y a longtemps que je veux vous écrire. Mes nuits se passent à faire de la prose pour la postérité ; c’est que je n’étais content ni de vous, ni de moi, ce qui est plus extraordinaire. Je me trouve aujourd’hui plus indulgent. J’ai entendu ce soir madame Persiani, qui m’a raccommodé avec la nature humaine. Si j’étais comme le roi Saül, je la prendrais en place d’un David. On me dit que M. de Pongerville, l’académicien, va mourir : cela me désole, car je ne le remplacerai pas, et je voudrais qu’il attendît jusqu’à ce que mon temps fût venu. Ce Pongerville-là a traduit en vers un poëte