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son portrait qui est d’une ressemblance achevée. Adieu ; tâchez de me dédommager par une jolie promenade de mon voyage de trois semaines.

CXXXVII

Bâle, 10 octobre 1850.

Il y a bien longtemps que je veux vous écrire et je ne sais comment il se fait que j’ai tant tardé. D’abord, j’ai vécu dans des lieux si déserts et si sauvages, qu’il n’était pas vraisemblable que la poste y pénétrât, et puis j’ai eu tant de gymnastique à faire pour visiter les châteaux gothiques des Vosges, que, le soir, il ne me restait plus de force pour prendre une plume. Le temps, qui avait été très-mauvais à mon départ, s’est mis au beau pour mon excursion d’Alsace, et j’ai joui très-complétement des montagnes, des bois et d’un air que la fumée de charbon de terre n’a jamais vicié, et qui n’a jamais vibré aux accents du chœur des Girondins. J’éprouvais un vif plaisir au milieu de ces lieux sauvages et je me