Page:Mérimée - Carmen.djvu/329

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

jourd’hui à la relire. Pourtant il y a bandits et bandits. Je trouve que la gloire de ces messieurs gagne singulièrement à être de fraîche date. Les bandits véritables font toujours tort à ceux du mélodrame, et le dernier pendu efface immanquablement la renommée de ses devanciers. Aujourd’hui ni Mombars ni Tarass Boulba ne peuvent exciter autant d’intérêt que ce Mussoni qui, le mois dernier, soutenait un siége en règle dans un trou de loup contre cent cinquante hommes, et qu’il fallut attaquer avec la sape et la mine. M. Gogol a fait de ses Zaporogues des portraits d’un coloris brillant qui plaît par son étrangeté même ; mais il est trop évident parfois qu’il ne les a pas copiés d’après nature. En outre, ces peintures de mœurs s’encadrent dans une fable si triviale et si romanesque, qu’on regrette fort de les voir si mal placées : la plus prosaïque légende vaudrait mieux que ces scènes de mélodrame où s’accumulent les incidents les plus lugubres, famine, supplices, etc. Au résumé, on sent que l’auteur se trouve sur un mauvais terrain ; son allure est embarrassée, et son style toujours ironique rend encore plus pénible la lecture de ces récits lamentables.

Cette manière, qui, à mon avis, est un véritable contre-sens dans quelques parties de Tarass Boulba, est