Page:Mérimée - Colomba et autres contes et nouvelles.djvu/380

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public. Le comité de salut public avait un tapis vert comme cela.

Juliette. Bah ! vous ne savez ce que vous dites. Madame a la révolution en horreur ; moi, je crois qu’ils veulent faire des bouts-rimés, comme on en a fait l’année dernière.

François. Qu’est-ce que c’est que des bouts-rimés ?

Juliette. C’est un jeu ; mais il faut avoir de l’esprit pour y jouer… Chacun écrit quelque chose sur un morceau de papier, et puis il y en a un qui lit, et tous les autres rient comme des fous. — Mais voici madame. Allez vite chercher le fauteuil qu’elle vous a dit.


Scène II.

FRANÇOIS, JULIETTE, LA COMTESSE DES TOURNELLES.

La comtesse. Juliette, approchez ici la sonnette de bronze de mon boudoir.

Juliette. La sonnette ?… Mais si madame veut m’appeler, j’entendrai bien mieux la sonnette de cette salle. — Celle-ci.

La comtesse. Je vous demande la sonnette de mon boudoir, et je ne vous dis pas que ce soit pour vous appeler… Allez.

Juliette. Je ne dis pas… J’y vais, madame. (À part.) Pourquoi tous ces apprêts ?

(Elle sort. François rentre portant un fauteuil de bureau.)

La comtesse. François, mettez ce fauteuil au milieu de la table… Imbécile, ne le mettez pas dessus, mais à côté. — Bien comme cela. Retirez-vous. (Il sort.) Cette salle à manger a l’air d’avoir été faite exprès pour notre réunion. Toute réflexion faite, elle vaut bien mieux que le souterrain de la vieille tour… Le souterrain serait plus poétique, mais il est trop humide, et nous y aurions gagné