Page:Müller-Simonis - Du Caucase au Golfe Persique.pdf/372

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
284
CHAPITRE XVI

paperasses la liste qu’il avait exigée de nous, mentionnant les localités que nous désirions visiter, il fait une confrontation ; par une singulière interversion des rôles, il prend tout d’un coup le plus tendre intérêt à la mission d’Hyvernat, déclare que nous n’avons pas fait tous les travaux annoncés et qu’il ne peut nous laisser partir avant l’achèvement de la mission ! Nous nous débattons comme de beaux diables. Nous sommes au 20 Novembre ; la moitié des localités indiquées par nous sont perdues dans la montagne et actuellement inaccessibles ; il est trop tard pour le Vali de déployer son zèle ; nous ne pouvons consentir à hiverner à Van, et il ne peut plus échapper au reproche qu’il voulait éviter, d’avoir rendu l’accomplissement de la mission impossible ! À force de discuter, nous le faisons capituler ; à vrai dire, il n’ose pas trop insister et il nous donne non seulement notre bouyourouldou, mais une lettre de recommandation pour le Vali de Bitlis.

Mais, quel chemin prendre ?

L’itinéraire ordinaire de Van à Bitlis suit la rive sud du lac jusqu’à Tadwân. Or les dernières nouvelles annoncent que cette route est rendue impraticable par les neiges ; les montagnes y plongent presque à pic dans le lac et la rive est orientée plein Nord. Aussi les neiges s’y accumulent-elles très tôt. La caravane dont j’ai parlé n’est toujours point annoncée et l’on n’est pas sans inquiétude à son sujet.

Il nous faut donc chercher une autre route ; elle est toute trouvée, c’est celle qui fait tout le tour du lac par le Nord, passant à Ardjîch et Akhlât. Elle est beaucoup plus longue, mais les montagnes moins abruptes y sont exposées au midi ; le pays est intéressant, peu visité — bref, nous sommes très contents d’être obligés d’allonger ainsi notre voyage. Au demeurant, nous ne sommes pas entièrement sûrs de pouvoir gagner Bitlis, car notre route rejoint le sentier ordinaire à Tadwân, et l’endroit où les neiges s’accumulent le plus se trouve précisément entre Tadwân et Bitlis, au plateau qui sépare le bassin du lac de Van