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BITLIS — SAÏRD — LE BOGHTAN

On assure qu’on y a trouvé beaucoup d’antiquités, des idoles et des médailles grecques. Il serait fort intéressant de faire des fouilles, et peut-être pourrait-on retrouver ici l’une de ces cités énigmatiques dont les géographes gréco-romains nous ont transmis les noms.

Nous voulons quitter Saïrd demain, mais voici une grosse difficulté. Il est peu sûr de voyager sans zabtiés. Or, les braves gendarmes de la garnison de Saïrd sont en grève. Leur solde n’a plus été payée depuis longtemps, et ils refusent de faire aucun service avant d’avoir reçu au moins un à-compte. Le zabtié à cheval a droit à une solde de 310 piastres par mois ; le zabtié à pied a droit à 145 piastres. Or, généralement lorsqu’ils arrivent à la caisse, munis de leur bon de payement, la réponse stéréotypée du caissier est : « La Caisse est vide ; je n’ai pas d’argent ». Parfois cela est vrai, souvent cela est faux. Le zabtié, espérant toujours, se contente de cette réponse pendant quelque temps ; à la longue, pour ne pas mourir de faim, il vend son bon de payement à un intermédiaire, pour la moitié de sa valeur. C’est là tout ce que voulait le caissier, qui reçoit ensuite la visite de l’intermédiaire ; il découvre immédiatement dans la caisse l’argent nécessaire ; le bon est payé, mais la différence se partage entre le caissier et son compère !

Le système est ingénieux : aussi bien est-il très répandu. À Bitlis M. X… nous disait avoir souvent été obligé de vendre à un entremetteur kurde ses bons de payement de 1 000 piastres pour 700 piastres !