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CHAPITRE XXVI

La petite ville de Mohamméré, située sur territoire persan, est à peu de distance de notre relâche. L’agent de la British-India y demeure ; ce pauvre homme a énormément à souffrir du fanatisme des habitants schiites. Son prédécesseur n’avait pu obtenir pour logement qu’une écurie. Pour lui on a eu un peu plus de pitié, et on lui a cédé une chambre ; mais personne ne veut lui vendre de maison ; le contrat ne serait d’ailleurs pas reconnu par le Scheikh de Mohamméré, quoiqu’on le dise assez bien disposé pour les Anglais, et bien qu’il soit assez européanisé pour s’être payé un steamer de plaisance. L’agent ne peut toucher à aucune marchandise sans l’acheter et tout Musulman se croit souillé par son contact ! C’est tout à fait vieux temps !

À hauteur de Mohamméré, le Schatt se divise en deux branches : la branche occidentale est la plus importante ; c’est celle que nous suivons ; l’orientale, Schatt Behemschîr peut être considérée comme appartenant au Karoûn. De récents sondages sembleraient prouver que la navigation y est plus facile que sur la branche occidentale.

À partir de Mohamméré le temps se gâte, et quand le soir nous jetons l’ancre à Faou, le vent souffle en tempête.

Le 2 Février nous franchissons la barre au delà de laquelle nous sommes accueillis par une tempête en règle.

Nous voici au golfe Persique. — Pour ne pas mentir au titre de mon livre je dois donc prendre congé du bienveillant lecteur ; puisse cet ouvrage lui donner l’idée d’entreprendre le même voyage ; difficultés, ennuis, dangers, sont choses qui passent ; le souvenir en est agréable, et grave plus profondément dans l’esprit et dans le cœur les grandioses tableaux de la nature orientale. Quelques mois dans la société de brigands ravivent en quelque sorte la nature, et tranchent agréablement sur la monotonie de la vie civilisée.

S’il me faut ici dire adieu à l’Orient, je sens en moi quelque chose qui proteste et qui dit « au revoir ! »

Treize jours de traversée nous menèrent à Bombay. Nous