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DE TIFLIS À ERIVAN

cinq lettres de recommandation pour les différents chefs de districts du gouvernement d’Erivan, et nous regagnons Akhta parfaitement enchantés de la réception qui nous a été faite.

Dans le lointain, nous devinons l’Ararat ; le pays que nous traversons est entièrement volcanique. Nous couchons au relais de Phontanka.


13 Septembre.

Ce matin le froid est glacial ; au moment où nous comptions nous mettre en route, surviennent plusieurs fonctionnaires munis du padarojni de la couronne ; comme ils ont le pas sur nous, nous voici menacés d’attendre longtemps nos chevaux ! Pour prendre patience nous parcourons les environs. Un plateau volcanique masque l’Ararat, mais vers l’ouest s’élève à plus de 4 000 mètres d’altitude l’Alagöz aux formes sauvages et déchiquetées[1].

Les paysans sont en train de battre les blés. Toutes les aires sont réunies en une même grande place au dehors du village où tout le monde fait le battage en même temps. On en use ainsi par précaution, car jusqu’à ces derniers temps le pays n’était pas sûr, et celui qui eut battu son blé seul eut été fort exposé à se voir pillé.

L’expression de « battre » le blé est impropre ; en réalité il est foulé et haché ; on se sert d’un traîneau plein dont la face inférieure est hérissée de lames de silex ; un homme se tient debout sur le traîneau que tirent deux buffles ; ceux-ci, attachés à un poteau, qui sert de pivot, tournent en rond. Les couteaux de silex déchaussent les grains et hachent la paille en menus morceaux ; cette paille menue sert de nourriture et de litière aux bestiaux ; elle entre aussi dans la composition des galettes combustibles dont il sera parlé plus loin[2].

  1. L’altitude de l’Alagöz 13 436 pieds = 4 094 mètres. Cf. Dubois de Montp. iii, 331.
  2. Parfois, en Perse surtout, au lieu de traîneaux armés de silex, on emploie une paire de cylindres hérissés de couteaux d’acier ; sur les axes de ces cylindres repose un bâtis que l’on charge de gros cailloux pour donner à la machine un poids suffisant.