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LE CHANT DE L’ÉQUIPAGE

mon mouchoir, vous éloignerez les deux matelots. Trouvez un prétexte. Attendez-moi ensuite dans la chaloupe, je vous rejoindrai. »

― Bouh, bouh, peuh ! Il n’y a rien, plus rien dans la tanière… que des boîtes de conserves, dit Krühl en revenant. Que fait donc Machin, là-bas. Ah ! comment l’appelez-vous, Conrad ?

À ce moment Conrad, se tournant vers Krühl et ses compagnons, agita le bras, leur faisant signe d’accourir au plus vite.

Eliasar, le capitaine Heresa et Peter Lâffe, abandonnant les deux monstres, s’élancèrent sur ses traces et le rejoignirent à temps pour le voir indiquer du doigt, au milieu d’une petite vallée, un ruisseau idyllique, qu’un homme, paraissant jouir d’une anatomie intégrale, troublait en remuant l’eau avec ses pieds nus !

Heresa hissa son mouchoir en manière de drapeau blanc au bout de sa canne, pour montrer à cet habitant de l’île que les intentions de la petite troupe étaient on ne peut plus pacifiques.

L’homme blanc, car c’était un blanc, vêtu d’un pantalon de coutil bleu et d’un mauvais maillot de football cerclé de raies noires et jaunes, réfléchissait profondément en contemplant avec sollicitude le jeu de ses doigts de pieds qui frétillaient dans l’eau fraîche. Il ne s’aperçut de la présence des étrangers qu’à l’instant même où ceux-ci atteignirent le bord du ruisseau à quelques mètres de lui.