Page:Machado de Assis - Mémoires posthumes de Bras Cubas.djvu/301

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Je me contenais pourtant ; mais un barbier du voisinage ayant eu l’idée de taquiner son classique violon, cette voix du passé nasillarde m’émut à tel point que…

Ses yeux à elle ne se mouillèrent pas. Elle n’avait point hérité de la fleur jaune et morbide. Qu’importe ! C’était ma sœur, mon sang, un peu de la chair de notre mère ; je le lui dis avec tendresse, avec sincérité… Tout à coup l’on frappe à la porte. Je vais ouvrir, c’était une gamine de cinq ans.

— Entre, Sara, dit Sabine.

C’était ma nièce. Je l’enlevai de terre, je l’embrassai à diverses reprises. La petite, ne sachant ce qui lui arrivait, me repoussait de sa petite main, en se courbant pour descendre. Et voici que j’aperçois un chapeau, puis une tête. C’était Cotrim lui-même, et je fus si ému que j’abandonnai la fille pour me lancer dans les bras du père. Il est possible que cette effusion n’ait pas été de son goût, car il parut en être gêné. Simple prologue. Au bout d’un instant, nous causions comme de vieux amis. Aucune allusion au passé, beaucoup de projets pour l’avenir, promesses sur promesses de