Page:Machado de Assis - Mémoires posthumes de Bras Cubas.djvu/435

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

homme autre que son mari, croit faillir à un devoir, et doit par conséquent dissimuler avec un art supérieur, et raffiner sa dissimulation ; tandis que l’amant, qui se sait la cause d’une trahison et se juge vainqueur de son semblable, est naturellement orgueilleux de cette victoire, et passe vite à un autre sentiment moins secret, à cette bonne fatuité, qui est la transpiration lumineuse du mérite.

Mais que mon explication soit ou ne soit pas probante, je me contenterai d’avoir bien fait ressortir dans ces pages que l’indiscrétion des femmes est un mensonge inventé par les hommes. En amour, tout au moins, elles sont silencieuses comme des sépulcres. Elles se trahissent souvent par maladresse, nervosité, ou faute de savoir s’abstenir de manifestations ou d’œillades ; et c’est pour ce motif qu’une grande dame qui fut en même temps une femme d’esprit, la reine de Navarre, a employé cette métaphore pour dire que toute aventure amoureuse se découvre tôt ou tard : « Le chien le mieux dressé finit toujours par aboyer. »