Page:Madame de Mornay - Memoires - tome 1.djvu/182

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velle de la mort de feu monseigneur le Prince[1], venue par poison, laquelle luy fut prononcée par monsieur du Plessis à part avec ces motz qu’il faisoit une notable perte, qu’aucunes fois noz nerfz et noz bras nous sont douloureux, mais que néantmoins ce sont nerfz et bras, et qu’à la vérité ce Prince luy donnoit quelquefois des traverses, mais sy lui estoit il un bras, la perte duquel il ne pouvoit pas recouvrer. Ce que S. M. ouyt et receut avec larmes non croyables, et tost après fit venir en son cabinet monseigneur le comte de Soissons et pleurèrent ensemble longuement. Ce mesme jour se résolut d’aller à la Rochelle en diligence, et ny peut sy tost arriver, que Marans ne feust pris par le sr de Laverdin, usant de l’ocasion. Monsr du Plessis, avec une petite trouppe de ses amys le suivit un jour après ; il trouva le procès jà remué contre dame de la Trémoille, veufve de monseigneur le Prince, comme coupable de sa mort, et sa personne prisonnière ; affaire perplexe et du commencement mal enfournée, dont il eut beaucoup de pene puis après. Ceste année se passa en diverses négociations et entreprises ; Marans fut repris avec beaucoup d’industrie et de valeur, et le Roy particulièrement se fia à M. du Plessis de tout ce qu’il falut reconnoistre et préparer pour l’exécution de ceste affaire. Le régiment de Gerzay fut deffaict par une grand cavalcade à trois lieues de Nantes ; Beauvais sur Mer fut

  1. Il mourut à Saint-Jean-d’Angély le 3 mai 1588. On accusa, sans que cela ait pu être prouvé, sa femme, Charlotte de la Trémoille, de l’avoir empoisonné.