Page:Madame de Mornay - Memoires - tome 1.djvu/53

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’Amiral luy en parla (par avis de monsieur Languet qui l’assura de sa suffisance, nonobstant son aâge, qui pouvoit estre de vingt-troys ans,) il luy dit qu’il estoit tout prest, non pour avencement qu’il en attendist, veu le hazard évident, mais parce qu’il s’assuroit que monsieur l’Amiral ne le voudroit pas employer en chose dont il ne vist ung apparent avencement de la gloire de Dieu, lequel le sauroit bien conduyre quand il s’employroit à son service. Le massacre, 24e d’aoust, jour St Barthélemy, rompit et ce desseing et plusieurs autres. Il y avoit troys sebmaines ou environ qu’il estoit de retour en France quand il fut fait, et luy ay souvent ouy dire qu’il se deffioit tousjours d’une mauvaise yssue ; mesmes, le jour des nopces du Roy de Navarre, il ne sortit guères, sy peu il prenoit de plaisir. Quelques avertissemens aussy s’en adressèrent à luy qu’il déclara mais sans fruict. Le vendredy précédent St Barthélemy, il estoit prest à s’en aller à Buhy avec madamoyselle sa mère (qui estoit venue à Paris), et avoit pris congé de feu monsieur l’Amiral pour troys jours. Avint qu’estant chez monsieur de Foix auquel il alloit dire à Dieu, ung sien serviteur alleman nommé Eberard Blanclz, luy vint dire que monsieur l’Amiral venoit d’estre blessé. Il y court, le rencontre et l’accompagne en son logis, et de ceste heure se redoubla en luy le soubçon du mal prochain, nonobstant lequel se résolut de laisser la botte et attendre l’yssue, telle que Dieu ordonnoit, quelques commandemens et prières que luy feist madamoyselle de Buhy, sa mère ; combien que luy mesmes feust cause, en luy disant le danger qu’il prévoyoit debvoir avenir, de la faire