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LA GRANDE FORÊT se lassait pas d’admirer ces tapis verdoyants de haute lisse, où se multipliaient le phryniuni et les aniômes, les fougères de vingt sortes qu’il fallait écarter. Et quelle variété d’arbres, les uns de bois dur, les autres de bois mou ! Ceux-ci,ainsi que l’a fait remarquer Stanley, lors de son Voyage dans les ténèbres de l’Afrique, remplacent le pin et le sapin des zones hyperboréennes. Rien qu’avec leurs larges feuilles, les in­ digènes ne sont pas gênés de se construire des cabanes pour une halte de quelques jours. Puis la forêt possédait encore par milliers des teks, des acajous, des cœurs-verts, des arbres de fer, des campêches de nature imputres­ cible, des copals de venue superbe, des manguiers arbo­ rescents, des sycomores qui pouvaient rivaliser àvec les plus beaux de l’Afrique orien­ tale, des orangers à l’état sauvage, des figuiers dont le tronc était blanccomme s’il eût été chaulé, des « mpafous » colossaux et d’autres arbres de toutes espèces. En réalité, ces multiples produits du régne végétal ne sont pas assez pressés pour nuire au développement de leur ramure, sous l’influence d’un climat à la fois chaud et humide. Il y aurait eu passage même pour les chariots d’une caravane, si des câbles, mesurant jus­ qu’il un pied d’épaisseur, n’eussent été tendus entre leurs bases. C’étaient d’interminables lianes qui s’enroulaient autour des fûts comme des fouillis de serpents. De toutes parts s’en­ chevêtrait un enguirlandement de branchages dont on ne saurait se faire une idée,des tortis capricieux, des festons ininterrompus allant des massifs aux halliers. Pas un rameau qui ne fût rattaché au rameau voisin ! Pas un

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tronc qui ne lïit relié par ces longues chaînes végétales, dont quelques-unes pendaient jus­ qu a terre comme des stalactites de verdure ! Pas une rugueuse écorce qui ne fût tapissée de mousses épaisses et veloutées sur lesquelles

couraient des millions d’insectes aux ailes pointiliées d’or ! Et des moindres amalgames de ces frondai­ sons s’échappait un concert de gazouillements, de hululements, ici des cris, là des Chants,qui s’éparpillaient du matin au soir. Les chants, c’étaient des myriades de becs qui les lançaient en roulades, trilles, rossi­ gnol a des plus variées et plus aigues qué celles d’un sifflet de quartier-maître à bord d’un navire de guerre. Et pouvait-on n’êtrc point assourdi par ce inonde ailé des ibis, des