Page:Magasin d'Éducation et de Récréation, Tome XIII, 1901.pdf/375

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
374
ANDRÉ LAURIE

n’importe quelle autre figure de fantaisie ! Quelle initiative, quelle physionomie voulez-vous qu’ait un malheureux végétal abruti par une éducation semblable ?

Ne soyons pas trop sévère, cependant, pour ce pauvre pommier domestiqué. S’il ne pose, ni pour la grâce, comme le saule pleureur, ni pour la majesté, comme l’orme ou le chêne, il faut avouer qu’il sait faire, en revanche d’admirables corolles quelquefois parfumées et que ses boutons de fleurs, coquettement entourés de franges vertes et teintés du carmin le plus pur, peuvent rivaliser avec ce que peut faire de mieux tel autre artiste en fabrication de fleurs naturelles.

Aussi, serait-il difficile de décrire un pommier tout en fleur. Ce n’est pas une plume, mais un pinceau qu’il faudrait pour rendre ces blancheurs virginales qu’éclaire comme un reflet d’aurore. La réalité disparaît sous la transfiguration ; on ne voit plus ni les branches rugueuses, ni les rameaux plus ou moins tordus. C’est un bouquet prodigieux, un de ces végétaux invraisemblables des apocalypses japonaises, où se profile, sur un fond de laque, un feuillage fantastique d’or, de nacre ou d’ivoire. Mais non, c’est mieux encore, parce qu’on sent que la vie anime cet ensemble de beauté diaphane et de grâce éphémère. On voudrait pouvoir préserver de la pluie, du froid, du vent, du moindre souffle ces fraîches corolles qui frissonnent au grand air, et l’on répète avec mélancolie :

Il faut qu’avril jaloux brûle de ses gelées
Le beau pommier trop fier de ses fleurs étoilées,
Neige odorante du printemps.

C’est dans les campagnes de la verte Normandie qu’il faut les voir à cette époque. Vergers, prairies, vallons se mamelonnent de ces dômes fleuris, et lorsque, du sommet de quelque colline, l’on voit s’ouvrir devant soi plusieurs vallées successives qu’encadrent les forêts sombres et que terminent à l’horizon les lignes des lointains bleuis, l’on demeure émerveillé devant ce doux paysage, où l’estompe des brumes marie si bien, sous un glacis harmonieux, tout le vert des prairies avec toutes les blancheurs des pommiers.

Le pommier (en latin malus) appartient à la sous-famille des pomacées, laquelle à son tour se rattache à la vaste famille des rosacées qui renferme presque tous nos arbres de verger.

Les botanistes ont longtemps confondu, et quelques-uns le font encore, le pommier avec le poirier, le sorbier et le coignassier. Pour les uns, il n’y a que deux genres, le pommier et le coignassier, ou le pommier et le poirier. Pour d’autres, il y en a trois, quatre pour certains autres ; car la question est fort obscure, et ce qu’il s’est échangé pendant deux siècles de mémoires, de rapports, de notes et de contre-notes défie toute nomenclature.

Ed. Grimard

(La suite prochainement.)


LES CHERCHEURS D’OR DE L’AFRIQUE AUSTRALE

COLETTE EN RHODESIA

(La guerre au Transvaal)

PAR
ANDRÉ LAURIE


XII

Après le combat.


Au pied du kopje, des corps d’hommes gisaient, et, par instants, une plainte lamentable, montant aux oreilles des vainqueurs, leur disait que tous n’avaient pas trouvé