Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, I.djvu/258

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nécessaire pour que le sol soit bien imprégné, et pour qu’elle ait déposé le limon précieux entraîné par elle.

L’eau opère quelquefois le régalement du sol par le battement des vagues dans les grands vents, ce qui nivelle les élévations qui sont à la surface. Elle consolide, raffermit le terrain, et le rend plus compacte.

Lorsque l’eau commence à s’éclaircir ou à se putréfier (ce qui est indiqué par une écume blanche qui se manifeste à sa superficie), il faut l’écouler le plus promptement possible et faire bien égoutter la prairie. Ce n’est que lorsqu’elle est complètement ressuyée que l’on doit renouveler l’inondation. Il faut procurer aux prairies cet engrais d’alluvion autant de fois que l’occasion s’en présente pendant l’hiver, observant toutefois les précautions indiquées ci-dessus.

Les irrigations par inondation sont employées avec beaucoup d’avantages pour fertiliser les terres en culture dans les pays méridionaux.

Au printemps, surtout lorsqu’il est sec et chaud, il faut donner une forte inondation d’eau limpide. Suivant Thaer, on peut laisser séjourner l’eau huit, douze, et même jusqu’à quatorze jours, ayant soin toujours de prévenir la putréfaction ; quand la prairie est bien ressuyée, donner une nouvelle inondation qui doit durer deux à trois jours, puis une troisième d’un jour à deux, et enfin une dernière d’un jour. Dès que l’herbe commence à s’élever, il faut cesser d’inonder la prairie.

Après la première coupe, si le temps est sec, on peut donner une inondation qui ne doit pas se prolonger au-delà de deux jours.

Le nombre de jours d’inondation indiqué par Thaer ne doit point être considéré comme un précepte absolu : la nature du sol et la température doivent régler le cultivateur ; plus le terrain est perméable, plus long temps et plus fréquemment on peut l’inonder ; plus il est argileux, moins on doit y laisser séjourner l’eau.

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§ ii. — Irrigation par infiltration.

L’irrigation par infiltration est très favorable, pendant les sécheresses de l’été, surtout dans les terrains légers et brûlans, et dans les pays méridionaux. L’eau, directement et par sa décomposition, secondée par la chaleur, contribue à la nutrition des plantes ; la végétation des régions intertropicales nous manifeste la puissance de ces élémens. Cette espèce d’irrigation convient particulièrement aux marais nouvellement desséchés, dont le sol spongieux et inflammable réclame beaucoup d’eau pour suffire à la nutrition des plantes et à leur développement. Elle est aussi particulièrement adoptée pour les prairies situées sur les bords de rivières qui peuvent servir à leur irrigation.

La fig. 353 donne un exemple de la manière dont on s’y prend pour distribuer les eaux de la rivière sur toute la surface de cette prairie.

Pour obtenir de cette espèce d’irrigation tout le succès désirable, il faut avoir à sa disposition un grand volume d’eau, pendant les chaleurs de l’été, parce qu’elle en consomme beaucoup, tant par l’imbibition que par l’évaporation. D’après de Perthuis, dans son Mémoire sur l’amélioration des prairies et sur les irrigations, il faut maintenir les eaux, dans les canaux qui entourent la prairie, à 17 centimètres au-dessous du niveau du terrain que l’on veut arroser de cette manière.

Fig. 353.

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§ iii. — Irrigation qu’on obtient en faisant refluer les eaux à la surface du sol.

Cette troisième espèce d’irrigation n’est pratiquée que dans peu de localités ; elle consiste à faire refluer l’eau dans les tranchées, ordinairement sans qu’elle se répande à la surface du sol. Elle a lieu principalement sur les terrains spongieux et marécageux, après qu’ils ont été desséchés. Cette nature de terre perd à sa superficie l’humidité à tel point que les plantes s’y fanent. Dans cet état, ces terrains tirent un grand avantage de l’eau que l’on fait refluer dans les canaux ou raies d’irrigation, en fermant le principal canal d’écoulement. Alors on laisse séjourner l’eau dans ces canaux ou raies, jusqu’à ce que les terres spongieuses en soient suffisamment imprégnées, et les plantes rafraîchies, après quoi on ferme le principal canal d’arrosement, et on ouvre les canaux d’écoulement pour que l’eau se retire le plus promptement possible. Cette opération ne produit d’effet sensible que dans les terrains spongieux et qui absorbent l’eau latéralement.

M. Sismodi, dans l’Agriculture toscane, nous apprend que l’on répand avec la pelle, sur les champs blé, l’eau qu’on a fait refluer dans les fossés. L’ouvrier se place au milieu du fossé et jette avec sa pelle, à droite et à gauche, l’eau à mesure qu’elle avance sur lui ; par ce moyen les billons voisins sont arrosés promptement et d’une manière égale.

Section iv. — Des travaux nécessaires pour l’irrigation.

Après avoir fait connaître les avantages des irrigations, les conditions dans lesquelles on doit les entreprendre, et les différens modes d’irriguer, nous allons nous occuper des travaux préliminaires, et des