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chap. 10e.
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de la pratique des assolemens.

semences alimentaires. En général la seconde méthode est préférable : parce que les binages qu’elle nécessite améliorent beaucoup mieux le sol pour la céréale suivante ; — parce que les produits peuvent être utilisés, selon les circonstances, à la nourriture des hommes ou à celle des animaux ; — et parce qu’enfin ils ont une valeur commerciale souvent plus importante.

Les pommes-de-terre conviennent moins aux terres fortes qu’aux sols sablo-argileux. — Dans les terrains argilo-sableux et même argileux, lorsqu’ils ont été suffisamment divisés, on peut néanmoins espérer des récoltes dont l’abondance compense en quelque sorte la qualité ; mais si l’on en croit l’opinion la plus répandue dans les campagnes, il y a peu d’avantages à les placer immédiatement avant une récolte de froment, lorsqu’on peut faire précéder cette céréale d’un beau trèfle ou d’une culture de fèves. La place des pommes-de-terre est en conséquence mieux marquée dans un assolement de quatre ans que dans une rotation triennale, à moins que, comme dans l’exemple ci-dessus, on n’ait avantage à substituer l’avoine au blé.

Quant aux choux, je ne nie pas que la culture en soit très-dispendieuse, car elle exige beaucoup d’engrais et de main-d’œuvre ; mais ces deux circonstances sont précisément celles qui contribuent le plus à la rendre profitable à l’assolement ; car, d’une part, les choux sont loin de consommer tout le fumier qu’on leur donne, et, de l’autre, nulle terre n’est à la fois plus nette et mieux divisée que celle qui vient d’en porter.

Il était naturel que la culture des choux, pour l’usage des bestiaux, se soit établie d’abord dans le nord de l’Europe, où la nature du climat la rendait plus nécessaire comme nourriture d’hiver, et plus praticable à cause de l’humidité de l’arrière-saison. Elle s’est étendue depuis, non seulement en Allemagne, en Angleterre et dans le nord de la France, mais jusqu’à l’ouest et au sud-ouest de ce dernier pays où, concurremment avec le trèfle, elle a rendu les plus grands services à l’agriculture, en améliorant le sol au point de transformer en terres à froment celles qui ne portaient précédemment que de l’orge ou du seigle, — ce qui est assez dire, par parenthèse, que les choux ne croissent pas exclusivement dans les terres argileuses ; — en faisant, plus que toute autre culture, comprendre l’importance de la chaux et des divers amendemens calcaires ; — en donnant les moyens d’augmenter le nombre des bestiaux ; etc., etc. — Malheureusement, dans les automnes d’une grande sécheresse, les choux ne réussissent pas à beaucoup près aussi bien ; mais alors aucune racine, si ce n’est peut-être la betterave, ne réussirait mieux. — Le choux-cavalier, que l’on cultive exclusivement dans presque toute la Bretagne et la Vendée, a même cet avantage précieux, que, pour peu qu’on puisse le faire reprendre au moment de la transplantation, c’est-à-dire vers septembre, si les pluies viennent ensuite à manquer, il languit sans périr, et il peut de nouveau se développer avec vigueur au retour de l’humidité.

Le rutabaga (Brassica napo brassica) peut parfois remplacer le navet dans les terres consistantes, qui conviendraient peu à ce dernier. Ses produits, avec une culture et dans un sol convenables, sont d’autant plus abondans qu’une fois que la végétation est avancée, la suppression des feuilles ne nuit pas sensiblement au dernier développement des racines. — Ce sont donc deux récoltes fourragères pour une. — On a dit que ce chou était moins délicat que la plupart des autres espèces ou variétés sur le choix des terres ; j’avoue que les essais que j’ai fait tenter chez moi ne viennent point à l’appui d’une telle assertion.

Quant au colza semé comme fourrage, j’ignore s’il donne quelque part de meilleurs produits que les choux ; — cultivé pour la graine, c’est une plante fort épuisante dont je ne crois pas que la culture puisse profitablement revenir tous les trois ans. Sa place me paraissant mieux marquée dans une rotation à plus long terme, je devrai nécessairement en dire quelque chose un peu plus loin.

En résumé, dans un sol très-pauvre, il peut arriver qu’un assolement triennal soit préférable à un assolement quadriennal, parce que, dans le second, les effets d’un seul engrais ne se font pas sentir jusqu’au renouvellement. Sous ce point de vue une rotation analogue à celle que je viens d’indiquer, surtout avec le parcage, lorsqu’il est possible, n’est point à rejeter. On donne ainsi à la terre deux fumures, une pour la culture sarclée, l’autre pour la céréale.

Afin d’éviter le retour trop fréquent du trèfle, il est facile de lui substituer, une année sur six, le sarrasin coupé comme fourrage, ou la lupuline dans les sols légers ; les vesces, les gesses, etc. dans les terres plus fortes ; mais alors l’assolement devient véritablement de six ans, et il n’en reste pas moins vrai qu’en le limitant strictement à trois, on se prive de nombreuses ressources.


B. Dans le midi de la France.
1o Dans les terres plus légères que fortes.

1re année : Pommes-de-terres fumées. — 2e année : Trèfle d’automne plâtré au printemps. — 3e année : Seigle.

1re année : Maïs avec fumier. — 2e année : Récolte enfouie en vert ou pâturée. — 3e année : Céréale.

2o Dans les terres plus fortes que légères.

1re année : Betteraves fumées. — 2e année : Froment. — 3e année : Maïs comme fourrage.

1re année : Fèves fumées. — 2e année : Blé. — 3e année : Maïs.

1re année : Maïs fourrage. — 2e année : Fèves enfouies après une 1re coupe. — 3e année : Froment.

1re année : Froment suivi immédiatement de lupins enfouis. — 2e année : Froment suivi le plus ordinairement d’un fourrage mélangé. — 3e année : Maïs, millet ou sorgho.

Ce dernier assolement appartient à la partie du littoral Toscan qui avait été réunie à