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AGRICULTURE : COMMUNICATIONS VICINALES ET RURALES.


d’un tiers de mètre cube, tandis que le tombereau ordinaire à un cheval porte 4 dixièmes de mètre cube[1].

En général, il faut, autant que possible, n’exécuter les terrassemens de chemins qu’au printemps ou dans le cœur de l’été, et jamais en automne, pour leur donner le temps de se tasser et de s’affermir avant la mauvaise saison ; autrement on risque de rendre le chemin impraticable pendant l’hiver. Il importe aussi de faire ces terrassemens dans les circonstances les plus favorables aux labours, c’est-à-dire lorsque les terrains, assez profondément trempés par les pluies, commencent à sécher à la surface.

Il est encore un soin important à prendre quand on fait des terrassemens de routes, c’est d’employer la terre la plus grasse au fond des remblais, ou sur leurs talus, et de ne mettre au milieu, et surtout en couche supérieure, que les terres sèches, les sables et les graviers.

Pour satisfaire à ces conditions, il faut, avant de faire le déblai, en reconnaître la nature par des fouilles, des tranchées latérales, ou quelques trous de sonde. On commence le déblai par les parties les plus glaiseuses, ou les plus grasses, pour les porter en première couche au fond des remblais ; ensuite, on met en seconde couche les terres mélangées, de qualité médiocre, puis par-dessus, en dernier lieu, les terres sableuses ou graveleuses, les graviers et les pierrailles. Si on trouve des marnes dans les déblais, il faut examiner si elles sont grasses ou sèches ; les marnes grasses seront mises au fond, les marnes sèches et la craie devront, au contraire, être conservées en dernière couche, parce qu’elles forment le meilleur fond pour l’établissement d’une chaussée d’empierrement ou en cailloutis : les terres végétales doivent être réservées pour le recouvrement des talus des remblais, afin de favoriser la végétation qui les consolide.

Il faut avoir soin de tasser les remblais ; pour cela il faut les étendre toujours par couches horizontales de 2 pieds au plus de hauteur, et faire passer les voitures également partout. Quand ils sont faits, on doit les laisser tasser avant d’y commencer les chaussées : pour que le tassement soit complet, il faut attendre au moins trois mois, et surtout qu’ils aient éprouvé une saison de pluie ; si on était obligé de livrer passage sur des remblais avant d’y faire une chaussée, et à plus forte raison si on ne devait pas en exécuter, il faudrait leur donner un bombement assez prononcé, et l’entretenir avec soin.

§ II. — Travaux d’amélioration sur les chemins convenablement réglés.

I. Du bombement. — Pour se former une juste idée des conditions à remplir pour obtenir de bons chemins, il suffit de remarquer qu’un terrain suffisamment tassé et bien sec, supporte sans enfoncement les plus lourdes voitures, et qu’elles y roulent facilement tant que la surface conserve sa fermeté ; mais que, dès qu’elle la perd, soit par la trituration qui la réduit en poussière, dans les temps secs, soit par la pénétration des pluies qui l’amollit, elle se rouage et devient incommode pour les voitures ; d’où il suit que pour avoir des chemins d’une résistance durable et d’un roulage facile, il importe surtout de les préserver de ces deux causes de destruction. Pour y parvenir, il faut empêcher les eaux de les pénétrer, et couvrir le terrain de substances capables de résister à l’action des roues.

Les eaux ne pénétrant la terre que quand elles peuvent y séjourner quelque temps, le premier soin à prendre pour éviter cette pénétration si nuisible, est de faire en sorte que jamais l’eau ne reste sur le chemin. Pour cela il faut lui donner un bombement qui peut varier du vingtième au cinquantième de la largeur, selon la nature du sol et sa pente. Mais, comme il est toujours un peu incommode, il ne faut lui donner que l’élévation indispensable pour l’écoulement des eaux ; ainsi, quand le terrain est ferme et difficilement perméable, on peut se borner au minimum du cinquantième. De même, quand la pente longitudinale du chemin est un peu forte, c’est-à-dire quand elle excède 4 centim. par mètre (ou un pouce et demi par toise), on peut aussi se borner à ce minimum, parce qu’alors la pente en long concourt en même temps que la pente en travers, à empêcher la stagnation des eaux. Mais, quelle que soit la pente, il faut toujours du bombement, sans quoi les eaux, en suivant la route sur une grande longueur, la ravineraient bientôt, tandis que par l’effet du bombement elles se déjettent obliquement, de chaque côté, dans les fossés ou les rigoles qui bordent le chemin, ou sur les terrains voisins lorsqu’il est en remblai.

II. Du tassement. — Le bombement étant formé, soit qu’on veuille ou non le recouvrir d’une chaussée, il faut le bien tasser, pour lui donner la force de résister à l’action des roues, et pour le rendre plus difficile à pénétrer par les eaux. Le moyen le meilleur et le plus économique d’opérer ce tassement est de faire rouler le chemin avec des cylindres de grande dimension et d’un grand poids. La grandeur du diamètre rend le tirage plus facile, et, pour que le tassement soit suffisant pour résister au roulage, il faut que le poids du cylindre soit plus considérable que la charge d’une voiture, parce qu’il porte sur une plus grande surface à la fois.

On fait ces cylindres facilement et à peu de frais en fixant, au moyen de fortes chevilles et de deux cercles en fer, de forts madriers sur les jantes d’une vieille paire de roues montées sur un long essieu (fig. 486). On remplit la cavité de ce cylindre entièrement avec de la terre bien tassée, et, quand on veut le rendre très-lourd, avec des pierres qu’il faut garnir de terre mouillée, en guise de mortier, pour les empêcher de se mouvoir. Les brancards se placent en dehors du cylindre et sont attachés à l’essieu par des colliers en

  1. Pour voir le tombereau mécanique, ou pour en acheter, on peut s’adresser à M. Cassasol, rue Coquillière, à Paris, et à M. Boutan, à Lafite, par Rieux (Haute-Garonne).