Page:Malato - La Grande Grève.djvu/146

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Mais en une société où les mots ne veulent plus rien dire, les étiquettes sont devenues une illusion : au moment où le parti qui se réclamait d’elles semble devoir triompher à force de luttes persévérantes, déjà ce parti n’est plus lui-même. De nouveaux venus, calculateurs avides, des habiles, des profiteurs, se sont glissés dans ses rangs, en feignant d’adopter son appellation et l’ont déjà écarté de la voie qu’il poursuivait.

Libéraux, républicains, socialistes, anarchistes ont été, sont ou seront soumis à cette loi sociale qui domine les efforts des individus, des plus courageux et des meilleurs.

Ce qui subsiste sous des étiquettes et des formules incessamment changeantes, c’est la lutte éternelle, incessante des tendances rivales : la force de réaction qui tend à ramener l’humanité au passé, celle d’inertie qui veut la river au présent, ce qui est également la mort ; celle de révolution, qui l’emporte vers l’avenir.

Les rouges de Climy, qui s’étaient qualifiés d’abord de républicains, puis de républicains radicaux, se proclamaient maintenant républicains radicaux-socialistes pour se différencier des radicaux pour rire qu’aucune démarcation ne séparait des opportunistes.

Dans cette commune agricole de petits propriétaires, ignorant la hideuse misère des centres industriels qui quelquefois mate, mais quelquefois aussi exaspère les revendications, ils constituaient indéniablement le parti le plus avancé.

Le collectivisme, le communisme leur étaient choses peu connues : une transformation économique par voie révolutionnaire leur apparaissait comme peu réalisable et pleine de périls. Seul, un vieux cultivateur, César Raulin, qui autrefois marin, puis photographe, avait couru le monde et finale-