Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/1459

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Ce dut être au moment de l’inclure dans son premier recueil de Poésies en 1887, que Mallarmé reprenant ce poëme, comme il le fît de plusieurs autres, lui donna l’aspeet definitif sous lequel nous le connaissons aujourd’hui et que reproduit notre édition. P. 40. DON DU POËME (Tournon, octohre 1865.) Bien que ce poëme fût alors composé, et dans son état à peu près définitif, Mallarmé ne crut pas devoir le comprendre dans le choix fait pour le Parnasse Contemporain de 1866, et ec ne fut qu’en 1883 qu’il le confia à Paul Verlaine pour ses Poètes maudits. Il parut dans ce recueil en avril 1884, après sa publication, au eours de l’étude de Verlaine, dans 1 .utcce (numéro du 24-30 novembre 1883) et, dit Verlaine, après avoir figuré dans le Courrier du Dimanche. Pourtant, dès l’automne 1865, l’auteur avait envoyé à Théodore Aubanel une copie, alors que ce poëme portait eomme titre : le Jour. Aubanel ayant découvert en ce poëme des obscurités qui ne lui semblaient pas souhaitables, Mallarmé révisa son texte et en adressa une nouvelle copie à cet ami, sous le titre, cette fois, de le Poëme Nocturne. Sur la feuille, Mallarmé avait écrit au crayon : « déchire la première eopie ». Et Aubanel, le 21 décembre, répondait à Mallarmé : « Quant à ta deuxième version du Poëme nocturne, il y a toujours dans la première partie des obscurités, des vers que je ne saisis pas bien. Est-ec ma faute ? » C’est au sujet du même poëme que Villiers de l’Isle-Adam adressa à Mallarmé, de Saint-Brieuc, où il était alors en train de corriger les épreuves de Morgane, cette lettre plaisante jjanvieri 866] : « J’étais au lit quand j’ai lu vos splendides vers. L’idée peu charitable m’est venu aussitôt de savoir comment une eréature faite à l’image de Dieu, entendrait, sycophante, de telles merveilles. C’était une tentation du démon, bien évidemment : j’y succombai. Et victime de l’insidieux, je me demandai à quelle âme de choix, je devais aller faire part de ces vers pour sa moralisation, son rachat et son réconfort. —Mon dévolu, guidé par la logique d’une âme clémente, devait naturellement tomber sur la plus digne. Est-il besoin d’ajouter que c’était ma cuisinière ? Non, n’est-ce pas ?... Mc sentant plus fort, je sautai à bas, je m’abluai : je n’hésitai pas même à revêtir mon pantalon pour être eorreet et ne point prêter à rire sur la dignité de ma mission de précurseur. J’avais acheté la veille un tambour pour les étrennes d'un de mes petits eousins. Je passai la bandoulière dans le sentiment de la solennité. Le tout avee la gravité la plus irréprochable. « Et, descendant vivement l’escalier, — je récitai à haute voix les quatorze vers dont j’accompagnai, dûment, ehaque hémistiehc, d’un roulement qui commandait l’attention et les rassemblements sur les paliers.