Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/514

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fond d’une lande ou des brumes, et de la réflexion surgi, afin de dominer par quelque moyen et d’attribuer à sa famille, ayant attendu au delà des temps, une souveraineté récente quasi mystique — pesait peu dans une frêle main, creuset de vérités dont l’eft'usion devait illuminer —- ne signifiait guère, sauf la particularité peut-être que nous professâmes, le vers n’étant autre qu’un mot parfait, vaste, natif, une adoration pour la vertu des mots : celle-ci ne pouvait être étrangère à qui venait conquérir tout avec un mot, son nom, autour duquel déjà il voyait, à vrai dire, matériellement, se rallumer le lustre, aujourd’hui discernable pour notre seul esprit. Le culte du vocable que la prosateur allait tant, et plus que personne, solenniser (et lequel n’est en dehors de toute doctrine, que la glorification de l’intimité même de la race, en sa fleur, le parler) serra tout de suite un lien entre les quelques-uns et lui : non que Villiers dédaignât le déploiement du mot en vers, il gardait dans quelque malle, avec la plaque de Malte, parmi les engins de captation du monde moderne, un recueil de poésies, visionnaire déjà, dont il trouva séant de ne point souffler, parmi des émailleurs et graveurs sur gemmes, préférant se rendre compte à la dérobée, attitude qui chez un débutant dénote du caractère. Même, après un laps, il fit lapidaire son enthousiasme, et paya la bienvenue parmi nous avec des lieds ou chants brefs. L’AVEU J'ai perdu la forêt, la plaine Et les frais avrils d'autrefois... Donne tes lèvres : leur haleine, Ce sera le souffle des bois ! J'ai perdu l'Océan morose, Son deuil, ses vagues, ses échos ; Dis-moi n'importe quelle chose : Ce sera la rumeur des flots. Lourd d'une tristesse royale Mon front songe aux soleils enfuis... Oh ! cache-moi dans ton sein pâle ! Ce sera le calme des nuits !