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Tout en les encourageant du sourire et du geste, il jaugeait du regard l’atelier et ses dépendances. Il constata avec plaisir que l’atelier de là-bas était bien plus vaste et bien plus commode. S’étant assis sur un cuveau renversé, il regarda travailler les deux André, et, tout en mâchonnant de minces frisons de bois, il philosopha pendant plus d’une demi-heure.

Quand il rentra à la maison, son filleul dormait dans son petit berceau. M. Pichon,qui n’avait pourtant pas le tempérament poétique, le com para tout couramment à un ange.

Flattée de la comparaison, la mère sourit, et proposa à l’oncle de visiter sa chambre, pour voir si elle lui conviendrait.

D’après tout ce qu’il avait vu, il savaitd’avance qu’elle lui plairait, mais il savait aussi que quand les gens se sont donné de la peine pour vous être agréables, il faut.être bien mal élevé pour les priver des éloges sur lesquels ils sont en droit de compter. Il déclara donc qu’il serait enchanté de faire un petit tour par là-baut.

Il s’engagea, à la suite de sa nièce, dans un petit escalier de bois un peu étroit, mais très propre.

« La troisième marche crie toujours, lui dit sa nièce en se retournant ; mais n’ayez pas peur, elle est solide quand même.

— C’est bon, ma fille, va toujours. »

La troisième marche cria, et les autres protestèrent par de faibles gémissements contre le poids insolite du conducteur dodu ; mais le conducteur dodu parvint sans encombre jusqu’à un petit corridor sur lequel donnaient plusieurs portes. Le corridor était tapissé d’un petit papier à fleurs très gai et les portes étaient peintes en gris clair.

Mme André Pichon ouvrit une de ces portes et s’effaça pour laisser passer son oncle. « C’est un peu étroit, dit-elle timidement.

— Étroit ! s’écria M. Pichon. Je voudrais bien que tu voies la chambre où je couche à Tours ; c’est-à-dire que c’est très grand ; on pourrait presque donner un bal ici. Et des rideaux blancs au lit ! et des rideaux blancs aux fenêtres ! Mon enfant, c’est du luxe. Une fenêtre qui donne sur la campagne et l’autre sur la cour ! Je n’ai qu’une fenêtre, moi, là-bas, et sais-tu sur quoi elle donne ? Elle donne sur l’arrière-cour d’une gargote, avec un grand mur noir en face !