Page:Maman J. Girardin.pdf/88

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Tout à coup le petit garçon se baissa pour ramasser un bâton d’épine dans la poussière de la route.

« N’y touchez pas, dit vivement M. Pichon ; on ne sait pas si celui qui l’a perdu avait les mains propres. »

Le petit garçon n’insista pas, seulement il dit:

« C’est dommage, cela m’aurait fait une belle canne. »

M. Pichon, sans prononcer une seule parole, franchit le fossé de la route, escalada le talus, et, tirant un couteau de sa poche, coupa deux beaux roseaux bien unis et bien droits, et revint près des enfants en disant:

« Vous aurez chacun une canne ! »

Les deux enfants se regardèrent, muets de surprise et d’admiration. En un tour de main, M. Pichon eut fait de ses deux roseaux deux cannes présentables.

« Oh ! merci ! monsieur Pichon ! » s’écrièrent-ils chacun à leur tour quand M. Pichon le leur tendit, en commençant par « la demoiselle », car M. Pichon savait vivre.

Le premier usage que firent les deux enfants de leurs cannes, ce fut de s’appuyer dessus avec des airs graves, comme des voyageurs fatigués, en déclarant que « c’était joliment commode pour marcher ! » Ensuite ils se précipitèrent vers la diligence pour faire admirer leurs cannes à leurs parents.

M. Pichon les devança vivement:

« Pas si près des roues ! » leur cria-t-il en étendant le manche de son fouet comme une barrière.

Le papa et la maman admirèrent les cannes, et il M Gilbert remercia le conducteur du regard en lui adressant un petit signe de tête qui voulait dire: « En vérité, vous les gâtez. »

À plusieurs reprises, les enfants avaient essayé d’apercevoir Marie, qui était dans l’intérieur. Mais Marie causait avec une bonne femme de la campagne et ne songeait point à regarder ce qui se passait sur la route.

« Marie aimerait peut-être à descendre aussi, dit la petite Louise à M. Pichon ; elle est toute seule et elle doit s’ennuyer.

—Nous lui demanderons à la première côte si elle veut descendre, répondit complaisamment M. Pichon ; maintenant il est trop tard. »

Comme les enfants s’étaient remis à marcher gravement sur l’ac-