Page:Marais - La Maison Pascal.djvu/34

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Cette enfant d’un autre siècle cachait, sous ses allures juvéniles de gamine turbulente, les rancœurs inavouées d’un célibat mal supporté. Tel le jeune Spartiate conservant un visage serein tandis que son renard lui déchirait les chairs, Mlle Pulchérie dissimulait d’un sourire héroïque les morsures de son intolérable virginité : ce qui prouve que des maux opposés peuvent aboutir aux mêmes sensations.

Ce troisième dimanche d’avril, dans son grand salon dont les fenêtres s’ouvraient sur l’avenue de Paris (le plus beau quartier de Montfleuri), c’était un défilé de visiteuses où dominait l’élément des demoiselles mûres. La maîtresse de la maison servait le thé, tripotant des assiettes, des cuillers et des tasses. Et Maria, la femme de chambre, promenait les corbeilles de gâteaux, tout en coulant vers ces dames les œillades ironiques et sournoises, le fin regard perspicace du domestique — notre juge ancillaire.

Arrêtée devant Mlles Zoé et Anaïs Planchin — sœurs jumelles de quarante-six ans, brunes