Page:Marais - La Maison Pascal.djvu/37

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De dix-huit à vingt-deux ans, Rose Véran, pleine d’illusions, avait pourchassé la proie conjugale, espérant la conquérir par ses seules qualités ; à vingt-trois ans, elle avait failli épouser un clerc de notaire qui s’était dérobé ensuite afin de contracter une union plus avantageuse ; désabusée, la jeune fille se découvrit alors une passion irrésistible pour le théâtre et d’admirables dons de comédienne. Elle étudia la déclamation. Bien des vocations féminines ont pris naissance d’un mariage manqué : l’art est le paravent des déceptions amoureuses.

Aujourd’hui, on prônait son talent dans tous les salons de Montfleuri ; et les invités — entre l’audition musicale d’une cantatrice mondaine ou d’un violoniste amateur — se plaisaient à entendre Mlle Véran réciter quelques poésies d’une voix chaude et prenante, aux intonations mélodieuses.

Pendant que Rose piquait des petits fours du bout de sa fourchette, la femme de chambre, inclinée vers elle avec une attitude déférente, se disait in petto :

— Je parie que Mademoiselle va encore de-