Page:Marais - Les bottes de l'ogre, Les Annales politiques et littéraires, 29-12-1918.djvu/5

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Le paysage avait cette sombre pâleur des nuits de frimas. Dans l’obscurité blafarde, l’enfant aperçut une lumière qui clignotait vers l’est. Une lumière, c’est la vie pour l’être perdu en forêt : un feu, au milieu des bois, c’est quelque chose qui cuit ou quelqu’un qui se chauffe.

Dégringolant de son arbre, il entraîna ses frères dans cette direction. Ils atteignirent enfin une habitation dont les fenêtres éclairées projetaient une lueur rougeâtre.

— On prépare le réveillon, ici, murmura le petit Poucet, plein d’espérance ; et il frappa à la porte.

Avant de comprendre ce qui leur advenait, les six enfants se sentirent happés, ficelés et jetés rudement sur le sol. Quand ils reprirent conscience, ils se trouvaient dans une vaste cuisine d’antan à haute cheminée et à rôtissoires imposantes. Devant le feu, l’Ogre légendaire surveillait la cuisson d’une chose qui offrait l’aspect d’un singe embroché. Les petits Schutz, terrifiés, étaient cruellement désappointés : ainsi arrive-t-il qu’en croyant frapper chez Ormuzd, on réveille Ahriman.

Soudain, des coups violents ébranlèrent la porte. Escomptant peut-être une nouvelle pâture, l’Ogre alla ouvrir.