Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/23

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Lui, dressant sa haute taille svelte d’un geste fier de vieux beau, me fixe d’un regard brillant, ardent, pétillant, qui garde un éclat de jeunesse, et me cause la même impression que sa voix : ces yeux vifs détonnent, sous la paupière griffée d’une patte d’oie.

À la fin, ma sotte attitude m’exaspère ; en général, lorsqu’on me présente un nouveau venu, le trouble n’est pas de mon côté. Pour rompre le charme, je m’éloigne, prenant un bras qui passe à ma portée, sans même regarder le propriétaire de ce bras. À trois pas, j’identifie mon compagnon : c’est le petit Julien Dangel, le jeune auteur qui interviewa Fréminet, tout à l’heure, à mon sujet, et s’étonna naïvement que je n’eusse pas un amant de cœur. C’est lui qui incarne le type du rôle, par exemple ! Blond doré, coiffé avec la raie de milieu, les yeux tendres, d’un bleu limpide, une moustache si claire qu’elle se confond presque dans le teint rose ambré des joues allongées ; Julien, trop joli, trop efféminé, a bien l’allure équivoque, la beauté veule, d’un monsieur que l’amour ne ruinera jamais.

Ce garçon me déplaît, par sa façon de m’observer, d’une œillade oblique ; l’air sérieux,