Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/59

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rassasie ; assouvir est une forme d’assoupir. Aujourd’hui, désabusée, désillusionnée, je n’entends pas compliquer le bonheur paisible de mes vingt-trois ans… L’amour, voyez-vous, c’est le coup du vol à l’américaine : il y a toujours un des deux amants qui échange son or contre un sac de cailloux. Je ne veux pas recommencer : j’aurais trop peur que l’or ne fût encore de mon côté.

Julien Dangel, pensif, m’interroge, après un silence :

— Ainsi, belle et vibrante comme vous l’êtes, vous envisagez sans ennui la perspective de cette solitude de cœur ?

Je souris ironiquement de sa phrase de roman-feuilleton, avant de répondre :

— Mon cher ami, je crois qu’une vie sans amour doit être monotone comme un jour de pluie… Je suppose également que mes aventures sentimentales sont loin d’être terminées et que l’une d’elles m’attend à quelque tournant du chemin, pour me faire la nique au moment où j’y songerai le moins… Il y a en moi un être fougueux, brutal, et sa violence me domine parfois… Mais, ce dont je suis certaine, c’est que vous ne serez pas celui qui en