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Page:Marais - Trio d amour.pdf/107

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Adrienne discernait, sans chercher à se donner le change, la totale indifférence de Robert Labrousse. Tantôt, elle s’enfiévrait : « Je préférerais qu’il me détestât… L’antipathie, on peut lutter contre elle ; parfois même avec succès… Tandis que l’indifférence, c’est une chose terrible, écrasante, qui vous oppose la résistance invincible des forces inertes. »

Tantôt, elle s’étonnait : « Comme c’est drôle que je ne lui plaise pas !… La plupart des hommes me regardent ; me suivent ; me poursuivent… On m’a fait cent fois la cour… Et je n’existe pas, aux yeux de M. Labrousse… Je deviens donc laide, quand je suis au bureau ? »

Un jour qu’elle s’examinait dans sa glace, elle fut illuminée d’une pensée soudaine :

— Parbleu ! C’est bien ce que j’avais soupçonné… Il ne doit pas aimer les brunes. Sa femme est blonde ; et Mistiche s’est décoloré les cheveux… »

Dès lors, Adrienne fut obsédée par cette idée. Le matin, en se coiffant, elle brossait ses longues tresses sombres avec une espèce de fureur ; irritée