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elle que les aristocrates dirigèrent leurs batteries. Se flattant que les provinces suivraient bientôt ses destinées, ils formèrent le projet de la réduire par la faim, le fer et le feu.

Sous le prétexte ridicule d’y maintenir sûreté et tranquillité, ils firent défiler des troupes. Pour qu’elles fussent dans leurs mains des instruments plus aveugles de fureur et d’oppressions, ils choisirent des troupes étrangères, des Allemands, dont les chefs étaient des créatures de la cour ; et crainte que la voie de la raison ne rappelât aux soldats qu’ils étaient hommes, que les infortunés qu’ils devaient égorger étaient leurs frères, on leur défendit, sous les peines les plus rigoureuses, de s’entretenir avec aucun citoyen, fût-il de leurs parents. Un vieux bigot, esclave du Prince par éducation, par devoir, par habitude, eut le commandement de ces légions sanguinaires. Bientôt arrivèrent de quelques places fortes des trains formidables d’artillerie, des boulets, des grils, appareil infernal destiné à réduire en cendres la reine des cités. Pour lui couper les vivres, on l’investit de toutes parts. On avait fait un camp devant l’École militaire, où était le magasin des farines : on en fit un autre dans la plaine de Saint-Denis ; et sous le voile des soins de la charité, qui s’occupe du sort des malheureux, on employa des milliers de manœuvres à mettre en état un chemin impraticable, qui conduit de cette plaine sur les hauteurs de Montmartre, où l’on pratiqua des plates-formes pour recevoir des batteries[1].

Lorsque tout fut prêt pour l’exécution de l’horrible projet, les conjurés levèrent le masque. Rassemblés dans

  1. Les représentants de la commune, qui s’efforçaient depuis si longtemps d’étouffer les vérités importantes au salut du peuple, ont cherché à répandre le bruit que ces travaux n’étaient entrepris que pour faciliter le transport du blé aux moulins ; mais aucune de ces plates-formes ne conduit aux moulins ; et la principale, qui domine Paris, n’est pas un chemin, puisqu’elle aboutit à un mur. (Note de Marat)