Page:Marat - Les Pamphlets, 1911, éd. Vellay.djvu/168

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antérieurs doivent recevoir toute leur exécution ; que personne n’y peut apporter d’obstacle, et qu’ainsi la délibération que le district a prise de mettre un visa sur les jugements portant décret de prise-de-corps, qui doivent s’exécuter dans l’étendue de son territoire, a, contre son intention, l’effet de blesser l’ordre public, et de renverser les principes ; qu’enfin l’Assemblée nationale attend du patriotisme du district des Cordeliers qu’il aidera l’exécution du décret, loin d’y porter obstacle. »

Lecture prise de cet arrêté, deux commissaires se transportèrent auprès du sieur Carles, pour lui déclarer que rien ne l’empêchait plus de mettre à exécution les ordres dont il était porteur ; à l’instant ma maison fut investie de tous côtés, et les rues adjacentes furent fermées par une triple ligne de soldats.

Le commandant-général attendait avec impatience l’arrêté de l’assemblée nationale, et la délibération du district des Cordeliers ses aides-de-camp les lui portèrent. Chargés de ses nouveaux ordres, ils se rendirent au Châtelet, allèrent chercher les huissiers, et les ramenèrent à mon domicile, où ils se présentèrent vers les six heures du soir. Trente officiers entrèrent alors dans mon appartement, l’épée à la main, et le fouillèrent complètement ; ils étaient déterminés à me mettre en pièces. Furieux de l’inutilité de leurs recherches, ils fourragèrent, passèrent leurs colères sur des pommes, et se mirent à empocher journaux, dénonciations et manuscrits[1], malgré les remontrances du commissaire, qui se piquait d’honnêteté pour les faire rougir. Des pandours en pays ennemi en auraient usé moins librement que ces dignes patriotes en usèrent chez un de leurs concitoyens, dont tout le crime était d’avoir voulu les empêcher

  1. Dans l’armoire aux fruits étaient trois rouleaux contenant : l’un sept lettres ployées, où sont développées des preuves authentiques des malversations de M. Necker ; l’autre tous les numéros de mon journal, corrigés pour une seconde édition, et l’autre le commencement de l’histoire de la révolution. (Note de Marat)