Page:Marat - Les Pamphlets, 1911, éd. Vellay.djvu/279

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on ne fait pas attention que l’Académie des sciences compte au nombre de ses membres les médecins les plus accrédités de la capitale : et tu conçois ce que peut la jalousie de métier : on ne fait pas attention non plus que l’Académie des sciences est composée d’adeptes de tout genre ; et tu conçois ce que peut la crainte d’être éclipsé. On ne fait pas attention encore que les membres de l’Académie française, qui se sont rangés sous les étendards de nos jongleurs, sont eux-mêmes de grands magiciens : le plus zélé disciple de Mesmer est un enchanteur de cour ; et la plus triste victime de Cagliostro est un prélat qui a travaillé au grand œuvre. Enfin on ne fait pas attention que tous les enthousiastes qui ont pris la plume se sont efforcés de faire passer les prestiges du Mesmérisme à la faveur des prodiges de la nature : c’est de l’émanation de la lumière des astres radieux qu’ils ont conclu l’influence des planètes sur les corps sublunaires ; et c’est de l’action invisible de l’aimant qu’ils ont conclu la réalité du magnétisme animal.

Ainsi, l’étude des sciences, qui procure si rarement de vraies lumières, traîne presque toujours à sa suite la crédulité et la superstition ; preuve évidente qu’elle ne convient pas à la multitude.

Mais ce n’est pas de Mesmer et de Cagliostro, que tu veux être entretenu ; leur règne est fini, et ils sont presque oubliés : c’est d’une autre espèce de charlatans, toujours au milieu de nous, courant les cercles, encensés par les trompettes de la renommée, engraissés par le gouvernement, et dévorant, dans l’oisiveté et les plaisirs, la substance du malheureux artisan, du pauvre laboureur.